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En 2018, il y a au fond une vérité fondamentale qui n’a pas été enseignée à cette génération :
Il y a d’une part toi comme tu te perçois. Puis il y a l’image de toi dans la tête des gens. Mais il n’existe aucune loi naturelle qui dicterait que les deux doivent être identiques. Ou alors on confondrait l’individuel et le social.

À chaque fois que je vois un voile depuis Manchester, j’y pense.

À chaque fois d’ailleurs depuis Londres, Nice, Paris, Bruxelles, San Bernardino, St-Jean, Ottawa, Boston, Madrid, Londres encore, New York… J’en oublie.  Depuis le Caire, Tel-Aviv, Beyrouth, Mogadiscio, Calcutta, Peshawar… J’en oublie encore plus.

À chaque fois que je vois le voile, je le vois avant de voir la femme, l’individu, qui le porte. On m’y a entrainé: tant de la part des voilées que de ceux qui le promeuvent.

Avant l’individu, avant la personne. Avant celle qui est sûrement une bonne mère et une bonne citoyenne, ou non… Je n’en sais strictement rien. Mais justement, elle m’intime de la voir comme « une musulmane », même si ce n’est parfois pas son plan à elle.  Avant de pouvoir la voir simplement comme une voisine ou comme une amie, elle aura toujours l’adjectif « musulmane » drapé sur sa tête, accolé à sa personne comme un stigmate.  Ce qui lui interdira surtout toujours de devenir la belle-mère de mes enfants.
Même si ce n’est pas son plan, c’est pourtant le but et surtout l’effet accompli.

Alors quand je sors le matin pour aller porter mon fils à l’école et que ma voisine voilée, puis les mamans en différentes tailles de niqabs qui attendent la cloche sur le bord de la clôture, puis les éducatrices et les maîtresses qui portent aussi le voile… je fais le lien.
C’est malgré moi.  Comme je sais que c’est aussi le lien spontané que font les inclusivistes, mais qu’ils s’efforcent ensuite de combattre.

Je fais le lien avec Manchester, puis avec ces mosquées où on conchie 3 fois par jour le juif et le kouffar. Je fais le lien avec les livres et les lois divines qui prêchent la mort. Je fais le lien parce qu’ils ont tous un adjectif commun.

Mes voisines et les éducatrices voilées de mon fils, pourtant, me disent toutes silencieusement, de leur regard : «Ne fais surtout pas le lien. On sait que notre voile est le même que celui du tueur, mais Chut! Tu n’as pas le droit de faire le lien, tu n’as pas le droit d’y penser. De toute façon, ça n’a rien à voir : Nous, nous ne sommes pas aussi rigides, et notre islam est fait de tolérance et de compromis

Ah oui?

Puis elles me disent toutes qu’elles préféreraient se faire hara kiri plutôt que d’enlever leur voile, de mettre en sourdine leur adjectif, ne serait-ce que pour 1 heure ou que pour un lieu comme la petite école.  Et que quiconque y voit un problème n’est sans appel qu’un « raciste ».


(…)




















































 

En sociologie, on ne peut jamais parler en termes absolus. Si on dit «les Un tels sont comme ci ou comme ça», une telle affirmation ne peut jamais être prise littéralement. Mais ça ne l’invalide pas complètement comme constat de la réalité sociale.
Je ne parle jamais en termes absolus. Mal nommer les choses… Mais on peut de manière parfaitement légitime dire «les Québécois aiment la poutine», même si seulement 20% l’adorent et qu’à peine 50% en mangent régulièrement. Parce que ça fait tout de même qu’il y ait un restaurant qui sert de la poutine à chaque quatre coin de rues de toute ville qui se respecte. Et quand un Québécois passe quelques années à l’étranger, il peut lui être réconfortant de manger une poutine, même si on n’est pas un amateur normalement. C’est une référence familière.
C’est en ces termes qu’il faut penser la culture. C’est-à-dire qu’en pensée sociologique, il faut éviter les grilles d’analyse manichéennes.

[J’ajouterais que le manichéisme, c’est ce que je reproche le plus souvent à ces philosophes rigides qui s’essayent à la sociologie avec leurs «arguments catégoriques» et leurs accusations hystériques de sophismes. Bref, Michel Seymour.]


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Ainsi, Louis Morissette serait raciste de vouloir imiter un noir, tout comme les artisans des spectacles Revue et corrigée, ou comme Mario Jean qui imita son ami Boucar Diouf. En fait, ils nous l’ont dit et redit : le Québec est une société foncièrement raciste en ce que des Québécois blancs croient pouvoir imiter quiconque sans tenir compte de sa « race ». (J’utilise le terme avec réticence, le croyant personnellement non seulement problématique mais néfaste.) Que nenni, ces comédiens font, sans le vouloir ni même le savoir, du « blackface comedy ».

Nos militants antiracistes semblent avoir des difficultés à distinguer forme et fond. On se demande si, lorsqu’ils voient des dauphins et des chauves-souris, ils ne les confondent pas avec des poissons et des oiseaux. Parce c’est exactement ce qu’ils font ici en parlant de blackface comedy. Quiconque n’est pas un militant antiraciste postmoderne peut aisément constater que le blackface est une émanation culturelle avec un contenu raciste spécifique, située dans un contexte social et historique bien précis. Dans le blackface comedy qui avait lieu il y a des décennies, principalement en provenance d’une Amérique très ségréguée, on moquait la négritude. C’est collectivement qu’on imitait les noirs pour les dénigrer.
Quand un Mario Jean ou un Louis Morissette se peint le visage en noir, ce n’est pas ça.   Ce n’est ni le procédé ni l’intention du blackface. Ça peut ressembler superficiellement, mais là s’arrête toute comparaison. Ceci parce que l’intention et le contexte comptent quand on cherche à comprendre la signification des actions de quelqu’un. De la part de ces comédiens, c’est au contraire une démarche des plus inclusives puisqu’ils imitent des individus noirs au même titre que des blancs, sans considérer qu’il devrait exister des barrières de races pour déterminer qui a le droit d’agir comment envers qui, ce qui est la définition-même du racisme.

On se demande. Et si c’était Morissette qui avait fait l’imitation de Bugingo plutôt que Brathwaite. Est-ce que sans changer une ligne du texte, par cette seule différence, comme par magie le sketch se serait transformé d’une satire de Bugingo en un dénigrement global de la négritude? Il faut croire que nos militants le pensent.

On se demande surtout ce que cherchent ces militants antiracistes lorsqu’ils nous expliquent que seuls des noirs devraient avoir le droit d’imiter d’autres noirs; puis seuls des Asiatiques imiter des Asiatiques, des Autochtones imiter des Autochtones et ainsi de suite. Il y a un terme pour ça : la ségrégation raciale. La ségrégation raciale comme solution au racisme, il fallait y penser!
Et c’est sans compter le ridicule de la chose, comme l’a révélé le fait d’engager Normand Brathwaite, qui a eu à se peindre le visage plus foncé pour imiter François Bugingo. Plusieurs se sont vite demandé si un mulâtre pouvait imiter un noir, ou alors s’il ne le peut qu’à moitié?…

On se demande par ailleurs en quoi nos militants antiracistes pensent qu’ils vont favoriser les relations interculturelles. En quoi leur action, qui semble surtout consister à exacerber le sentiment victimaire des uns et à forcer une éternelle repentance collective de la part des autres, va-t-elle favoriser des relations et des rencontres plus spontanées, chaleureuses et fraternelles? Au contraire d’une réelle conscience antiraciste qui devrait nous inviter à combattre la perception de barrières et de frontières raciales maintenues artificiellement, ils nous invitent plutôt à « racialiser » toutes nos interactions sociales. Leur version bien particulière de l’antiracisme cherche à consolider la notion de races, et donc le racisme, dans les esprits.
Nous devrons maintenant toujours prendre en compte la prétendue race d’autrui avant de déterminer quoi dire ou quoi faire par rapport à eux. Je le redis, c’est de la discrimination raciale pure et simple. Puis surtout, dorénavant, dans toute situation de rencontres interpersonnelles interraciales, nous devrons avancer anxieusement sur des œufs, en ne sachant jamais laquelle de nos paroles ou lequel de nos gestes pourra être perçu comme une manifestation de racisme parce que ressemblant superficiellement à telle pratique historique et/ou étrangère. Nous nous demanderons en permanence quand l’opprobre et les exigences de séances d’auto-dénonciation à la sauce maoïste nous tomberont dessus depuis les réseaux sociaux, comme cette pétition.  C’est proprement kafkaïen.

Pour terminer, personne ne nie qu’il y ait une sous-représentation des minorités à la télévision, ni que les minorités vivent du racisme au Québec. Une société et sa culture sont un très gros paquebot qui ne change pas de cap en criant ciseaux. Nous évoluons, et généralement dans la bonne direction. Mais nos militants antiracistes n’aident en rien lorsqu’ils proposent — que dis-je, nous intiment! — de pratiquer la discrimination raciale et la ségrégation. Ils aident encore moins quand ils s’acharnent à assassiner publiquement des comédiens qui n’ont rien de raciste, ni dans leur personne ni dans leur travail. Ils font une mauvaise analyse et ne font qu’envenimer les relations.

 


 

PS

Normand Brathwaite, en entrevue à En mode Salvail, s’est indigné de la Ligues des noirs à propos de cette affaire. Il a proclamé que le Québec n’est pas une société raciste et que leur indignation est une importation américaine. Il a surtout demandé :
« Je ne sais pas c’est qui la Ligue des Noirs. J’ai pas voté pour eux. La Ligue des noirs, c’est 4 noirs avec un fax dans un local en quelque part ». (Je cite de mémoire.)

Bien sûr, aujourd’hui, la Ligue des noirs a répliqué que Brathwaite n’est pas un vrai noir, mais un bouffon de service qui n’a jamais vraiment rien fait pour faire avancer la cause des noirs au Québec…  Misère.

Personnellement, je crois que Normand Brathwaite est un Québécois exceptionnel. Ne serait-ce qu’en télé, même sans compter son héritage au théâtre (Pied de poule!) et musical (Larmes de métal!).  Juste en télé, il y a un Québec avant et un Québec après Normand Brathwaite, depuis Beau et Chaud, qui a été une révolution télévisuelle.  Allô Boubou n’est juste plus possible à cause de Normand Brathwaite.  Et La fin du monde est à 7 heures n’a été possible que grâce à Normand Brathwaite.
Depuis Patwice de Chez Denise jusqu’à aujourd’hui avec des émissions phares comme Belle et Bum.  Normand Brathwaite a énormément fait pour la cause des noirs au Québec.
Comme Grégory Charles, comme Didier Lucien, comme Maka Kotto… Comme tous mes collègues haïtiens ou africains à mon boulot aujourd’hui et depuis l’université.  Ils font énormément en participant tout simplement, plutôt qu’en récriminant tout le temps et en essayant de braquer les uns contre les autres à coups de revendications identitaires.

Normand Brathwaite a souvent parlé de sa mère et de sa tante qui ont toutes deux épousé des noirs, à une époque où ça suscitait des regards obliques et des commentaires au Québec. Mais comme il dit lui-même ç’aurait été quasi impossible aux États-Unis à cette époque, d’où provient justement le blackface. Or, aujourd’hui, la moitié des couples de parents que je rencontre tous les jours à la garderie de mon fils sont mixtes. C’est ça le Québec, celui dans lequel des Normand Brathwaite ont normalisé et apaisé les relations interraciales.
Et comme il le souligne enfin, encore aujourd’hui aux États-Unis, les couples mixtes sont problématiques.  Aux États-Unis et dans le monde anglo-saxon, d’où provient toujours le blackface.


























 

C’est bizarre. J’ai beau être blanc, mâle et occidental, je ne semble pas accéder au «boys’ club» dont je suis apparemment si privilégié de faire partie…

Ça devrait pourtant m’échoir de naissance. Au contraire, je sens que j’ai été plutôt discriminé dans la vie. En étant pauvre dans un collège de riches, en étant un introverti individualiste et un peu original entouré de gens de gang. Un gars qui ne comprend rien au hockey ni aux chars, un pas cool qui s’est fait intimider depuis l’âge de 4 ans dans la ruelle derrière chez lui jusqu’au milieu de l’école secondaire. Quelqu’un qui plus tard a souffert de dépression et qui ne comprend toujours pas toute l’agitation autour de lui à propos du succès, de la performance professionnelle, de l’importance de faire partie de «l’équipe»… Quelqu’un dont l’avenir professionnel est complètement bouché à ce stade.

Je suis un «néo-colonialiste», ah oui? Je traine pourtant dans mon bagage des générations de petitesse. Comme par exemple mon grand-père : un homme grand, mais qui a réussi à devenir assez petit pour toffer à travers toute une vie de petites humiliations, comme celle de devoir toujours parler la langue de ses maîtres chez lui.
Il regardait les étoiles avec un télescope pourtant. Sans éducation, lui qui avait appris à compter et à lire tout seul, même en anglais. Ce télescope fut probablement la seule dépense folle de toute sa vie. Lui à qui il fallut mentir quand j’ai renié le petit Jésus-Christ. Lui qui ne s’est jamais divorcé d’une femme, ma grand-mère, qui lui a pourri la vie à l’accuser de tous les péchés bibliques. Lui pour qui l’humilité et l’obéissance, bibliques aussi, étaient actes de foi pieuse.

Alors dites-moi encore que je n’ai pas droit de parole, parce que ma parole est «raciste». Ceci quand je vois des «néo-Québécois», ou même des «Québécois de souche», se faire rapetisser par les mêmes combines encore. Redites-moi que je suis «paternaliste» lorsque je constate que la même religiosité pointe à nouveau son nez puant chez moi, mais avec une rage dans ses textes et ses revendications qui n’avait jamais encore existée ici auparavant.  Dites-moi encore — parce que je suis sourd d’une oreille, celle tournée vers le passé –, redites-moi encore comment je n’ai ni le droit de commenter ni celui de voir.

Décrétez surtout que je n’aie pas le droit de m’inquiéter. Stipulez que je n’aie pas le droit de demander si je pourrai laisser mon héritage dans les mains de ce futur qui annonce le retour de ce que mon grand-père a vécu.

On commençait pourtant à peine à s’en sortir…

































Je viens de lire que : «l’islam n’est pas une religion, c’est une orthopraxie». Ça m’a rappelé que je n’avais aucune idée que ce mot existait…
Il a apparemment plusieurs sens, mais dans le cas de cette religion, ça veut dire : l’action dans le réel (la praxis) sur la base d’une application rigoureuse (orthodoxe) de la charia, comprise comme le sentier de la vertu…

Mouins…

Mais toutes les religions sont des praxis. Comme toutes les idéologies. Ce sont toutes des idées qui circulent et qui forment, qui informent des communautés, des peuples, des nations dans leur action. À tous ces niveaux, les humains s’assemblent spontanément. Puis ils se créent des rites, ils célèbrent leurs histoires, leurs héros, leurs chansons. Et à tous ces niveaux, ils se relient ou ils se boudent ou ils s’affrontent. Ils le font le plus fréquemment sur la base de bêtes affinités ressenties : entre individus, entre fratries, entre familles, par voisinages, entre communautés, par «races» perçues, etc..
Des affinités qui peuvent être facilement exploitées par des leaders politiques qui, eux, ne cherchent qu’à mobiliser quiconque sera mobilisable à leur propre profit.

Et l’outil qui, de tous les temps, permet d’exploiter le plus facilement les affinités individuelles dans le but de contrôler d’abord les corps puis les esprits, cet outil c’est la religion. On occupe par «morale», par «pudeur», d’abord le corps de la femme, puis les «pulsions» du mari. Toujours. On désacralise l’individu pour sacraliser la communauté. L’individu en vient à exister socialement d’abord sous sa bannière communautaire : son voile, sa kippa, son crucifix, son turban… Chacun en vient à ne plus voir que sa communauté et celles des autres. Et il s’agit toujours de contrôler la reproduction. Qui a le droit de faire des bébés avec qui? Toujours.

Un assemblage de communautés n’est pas une société, encore moins une nation. Au mieux, c’est un assemblage de communautés. Au moins mieux, c’est un désassemblage de communautés. Au pire, c’est la guerre civile et religieuse.

L’islam n’est que la version la plus sévère, en cette ère, de cet esprit communautaire. Celui qui marque aujourd’hui le corps de ses membres, et surtout le sexe de «ses femmes». L’islam n’est que la moins pastorale des «grandes religions».  La plus guerrière.

































Il existe l’Humanité.  Elle est un tout.  Elle comprend moi qui suis en train d’écrire ceci autant que vous qui le lisez.  Elle comprend tant nous qui sommes en train d’avoir cette relation qu’elle comprend Gengis Khan envahissant l’Europe après l’Asie, qu’elle comprend un chasseur-cueilleur du Paléolithique regardant la Lune le soir il y a 3 millions d’années comme je viens d’aller la regarder sur mon balcon.

Il existe l’Humain.  Ce singe dégarni qui, depuis qu’il a décidé de se tenir debout dans une savane, regarde les étoiles, puis mange la viande qu’il trouve, puis bèche des champs, puis tente d’élever ses enfants, qui consomme les ressources autour de lui.

Puis il existe les groupes qu’il se crée.  Les fratries, les clans, les tribus, les associations, les fraternités, les écoles de pensée, les idéologies, etc.  Il se crée des affinités, puis des allégeances spontanées, des solidarités.

À l’échelle plus globale, on rencontre sur différents territoires et à certaines époques des foyers d’occupation, des foyers culturels.  On dirait en anglais des «hubs» : des centres névralgiques.  Le Québec en est un.  Ce sont des continuités culturelles qui se décident dans l’Histoire, par la vigueur de ceux qui décident de les habiter.  Les Nations en sont, ainsi que les États et les Peuples.  Mais non les communautés, ni les ethnies, qui sont de fausses catégories sociologiques, inutiles.

Aujourd’hui, nos intellectuels tentent de faire éclater cette dynamique.  Ils souhaitent qu’il n’y ait plus ici de hub particulier.  Ils croient que pour faire progresser l’Humanité, il faille faire éclater le hub.  Faire de cet endroit, d’ici, un terminal d’aéroport où seuls comptent les exilés de passage, où seules ont voix les identités égarées.  Ils travaillent à ce que n’importe quel quidam en visite, ou pourquoi pas  en transit, fut-il Gengis Khan, se sente le bienvenu.

Si je parle survivance, c’est parce que je crois en effet qu’il y a ici un espace de traditions.  Une société quoi, une Nation.  Rien de parfait.  Une vraie petite société toute croche avec son lot des laideurs et de stupidité.  Comme toutes les nations.  Mais nous avons comme au moins un désir d’apprendre.  Nous ne sommes pas sclérosés.

Je constate qu’il existe des sociétés dont nous devrions apprendre.  Je constate aussi, au contraire, qu’il y a des sociétés complètement coagulées autour de leur «identité», de leur «religion», de «leurs femmes»…  Si bien que ceux et celles de leurs membres qui immigrent ici vivent comme un choc à l’idée de leur intégration à nous.  Oui, ils veulent nous être sympathiques, et c’est tant mieux, mais ils se posent en victimes dès leur arrivée.  Puis il y a les accusations de «racisme», puis les menaces.  Puis il y a la population toute croche et normalement tranquille qui réagit.  Puis on parle d’«islamophobie»…  Puis c’est partout pareil.  On veut accommoder la religion, mais la religion ne nous accommode pas.

Le catholicisme s’est jadis implanté sensiblement de la même manière.  En s’imposant.  Aujourd’hui, l’islam tente de faire la même chose.  Certains d’entre nous disent «Non, on y a déjà goûté!».  D’autres disent qu’il est temps qu’on y goute à notre tour…

C’est ridicule, mais ça colle chez beaucoup de nos «intellectuels» qui semblent toujours plus portés sur la repentance que sur la Raison.

Je vous laisse en juger.















[Retour sur le vote masqué et l’histoire de l’assermentation en niqab.  J’ai écrit ceci à la veille de l’élection, en réaction à cet article de David Desjardins, d’où suinte un mépris du peuple sale et raciste que nous sommes…]

J’ai voté masqué. Je suis sûrement de ces cons racistes qui attendent toujours la moindre occasion (la Charte, les élections, des accommodements isolés à répétition, des nouvelles anecdotiques et anodines de tueries de bédéistes, etc.) pour épancher notre peur et notre haine irraisonnée de l’«autre» quel qu’il soit. De ces cons qui forment quelques 93% du peuple quoi. Je n’ai donc pu m’empêcher de m’affubler d’un masque de clown lorsque j’ai coché mon bulletin, dans un de ces réflexes primaires qui m’animent quand je ne réfléchis à rien, ce qui est mon état normal. Mon masque ne pouvait évidemment vouloir que dire : «Eille tabarnak, toutes les races e’rtournez chez vous!», comme le crient apparemment en cœur une marée de Québécois sur les réseaux sociaux (6, 7, 8 millions d’entre nous?…) depuis que Harper et le Bloc nous ont commandé de le faire. C’est en tout cas le scénario qu’on nous dépeint à grandes lignes éditoriales de La Presse et de Radio-Canada, dans des motions de Québec solidaires et des sermons «inclusivistes». Ou comme encore récemment dans les pages du Devoir, sous la plume de David Desjardins («Qui méprise qui?», 17 octobre 2015).

Parce que non, impossible que j’aie constaté la manœuvre crasse de Harper et que malgré ça, cette histoire de niqab, tout ce qui la précède et tout ce qu’elle annonce, m’apparaisse légitimement être un enjeu sociétal des plus importants; en plus de l’environnement, de l’économie, de la science, de l’éducation, des autochtones, etc. Bien entendu que boire de l’eau pure et avoir une bonne job compte, mais peut-être que dans mon évaluation tarée des choses, on y goûtera avec un peu moins de sérénité si c’est pour vivre en contrepartie dans une société où règnent les divisions interreligieuses, marquées par les ségrégations symboliques, culturelles, sociales et de plus en plus institutionnelles, comme on peut en observer dans tant de sociétés où ça va si bien. Je regarde mes politiciens courtiser les votes communautaristes plutôt que citoyens, tandis que nos élites intellectuelles de gauche larmoient sur notre tyrannie majoritaire qu’ils voient jusque dans leur soupe à défaut de nulle part ailleurs. Tandis qu’ils se scandalisent des «droits individuels bafoués» de militantes islamistes notoires comme Zunera Ishaq! Je regarde mes politiciens et intellectuels encourager les replis identitaires de toutes parts…

Mais non, je l’admets. Je me suis fait prendre. Habilement berné par Harper, j’ai sauté sans réfléchir sur l’occasion de confondre une seule femme en niqab avec une invasion islamiste en règle. Depuis, dès que j’entraperçois quelqu’un un tant soit peu basané dans la rue, j’assume que 1) c’est un musulman qui vient m’envahir et que 2) c’est nécessairement un terroriste. Que voulez-vous, je suis bête comme ça.  Et c’est ce que mon vote masqué voulait dire. Rien à voir surtout avec une protestation pacifique, avec une démonstration par l’absurde de ce que les politiques sont en train de faire à notre démocratie malgré nos protestations répétées, et maintenant jusqu’au plus haut échelon qu’est le serment de citoyenneté. Cette dernière provocation ne vient que couronner les milles et unes petites ségrégations vestimentaires, alimentaires, sexuelles, matrimoniales, etc. qu’on ne cesse d’encourager depuis les cours d’écoles jusque dans les tribunaux, en passant par les piscines, les épiceries, le travail, les cimetières… Bref, tous les genres de lieux où moi et ma famille sommes susceptibles de nous trouver, mais pas mal plus rarement celles des politiciens et intellectuels qui vantent la «diversité»…
Parce que voyez-vous, j’oublie parfois que c’est si beau la «diversité», surtout l’islamique : la diversité qu’on représente dans toutes les pubs par une femme voilée. Merci alors de me le rappeler. (Curieux d’ailleurs que la «diversité» qu’on nous accuse de rejeter sans essayer d’en comprendre les indéniables bénéfices porte toujours le même uniforme pas si diversifié…)

Qu’on me rappelle surtout encore comment une Zunera Ishaq est triste et déçue de nous quand on lui demande de se garder une petite gêne en société, comme nous avons nous-même eu à l’apprendre. Quand on ne lui suggère que de garder sa religion bien au chaud dans sa tête, plutôt que portée en étendard identitaire sur tout son corps. Comme on la brime, la pauvre, quand on lui suggère simplement de ne pas faire affront à la démocratie séculière : ce qu’elle fait en prétextant qu’il en va de sa «pudeur». Ironiquement, elle décide précisément d’exhiber ce que la vaste majorité de gens qui l’entoure considère comme privé… Non pas ses cheveux ou ses poignets, qui n’excitent absolument personne, mais bien ses croyances, dont de grands pans sont une véritable offense en règle envers tous les non-croyants et autres «infidèles» et «mécréantes», aux femmes non voilées, aux minorités sexuelles, etc. Alors oui, elle exhibe ses parties privées offensantes et nous dit que c’est par pudeur… Faut quand même applaudir!

Mais qui sommes-nous pour y voir un quelconque problème? C’est certainement du délire. Il nous faut un vrai remède de cheval (de Troie?). Il faut sans tarder saigner ce mal, cette «identitarite aiguë», créée de toutes pièces par la Charte du PQ, puis par Harper, puis le Bloc. Ne restera ensuite qu’à expliquer les causes des symptômes similaires qu’on rencontre curieusement partout : en France, en Angleterre, en Allemagne, en Espagne, en Norvège, en Suisse, en Roumanie, en Russie… jusqu’en Thaïlande. Si dans tant de sociétés aux mœurs, traditions et orientations politiques différentes, si partout les voiles et niqab créent autant de remous et de tensions, il n’y a qu’une seule conclusion possible : une pandémie mondiale d’islamophobie sortie d’absolument nulle part qu’il faut médicamenter en nous injectant dans la gorge toujours plus de différentialisme religieux.

Maudit peuple congénitalement réactionnaire qui ne veut pas comprendre que plus de religion exacerbée sur la place publique et dans les institutions mènera à plus d’harmonie et de liberté de conscience, comme on peut le constater partout! Encore une chance que la gauche se soit trouvé un meilleur peuple avec les immigrants, surtout islamiques encore ici, pour remplacer les sales prolos qui ne votent pas assez souvent du bon bord.
[Ou alors, se pourrait-il que ce soient les faits qui poussent à la réaction? Des «faits réactionnaires» donc? Intéressant… Mieux vaudrait carrément interdire les faits alors, un coup parti, puisqu’on parle déjà de nous interdire de les dénoncer, voire de les énoncer. Autant aller jusqu’au bout.]

Alors j’ai voté masqué. Croyez-moi, je me suis trouvé stupide de le faire. Face au regard (heureusement) amusé des agents de vote cette journée-là, je n’ai pu m’empêcher de lâcher un «Comme quoi le ridicule ne tue pas»… Parce que c’est par le ridicule que j’ai choisi de protester contre le ridicule, le plus sérieusement du monde.

Si vous avez toujours de la difficulté à comprendre, si tant est que vous essayiez sincèrement. J’ai surtout protesté contre le fait qu’il y a 10 ans à peine, on m’aurait ri en pleine face et on m’aurait dit d’enlever ce masque à la con pour pouvoir voter, et c’est ce qui aurait été censé. Mais aujourd’hui, nous sommes devenus si timorés face à des provocations identitaro-religieuses, comme celle de Zunera Ishaq, qu’on a poussé le ridicule jusqu’à me permettre de piler sur ce droit fondamental à mon tour, simplement afin que des juges de la Cour suprême puissent tenter de préserver un semblant de cohérence intellectuelle.

Croyez-moi surtout, je préfère encore ce ridicule que les réactions beaucoup plus inquiétantes qui s’en viendront si nos politiciens et intellectuels continuent de bafouer ce que nous avons de plus cher, notre citoyenneté. Eux bien plus gravement que moi. S’ils continuent surtout de tenter de nous museler sur le sujet. Car ils n’auront qu’eux-mêmes à blâmer le jour où nous verrons un vrai Front national apparaître et prendre du galon ici, lorsque ça deviendra la seule réaction à la portée du peuple, celle-là pas mal moins rigolote. Je ne fais pas de menaces : j’exprime une crainte sincère.

PS- Que David Desjardins et consorts se consolent : ma stupidité annule en partie ma xénophobie apparemment. Si j’ai sauté à pieds joints dans le piège de Harper tel qu’il le prétend, il semblerait que comme la plupart des autres j’aie trouvé le moyen de tomber à côté en ne votant pas conservateur. Do’h!

Je regarde mon parcours familial et académique depuis 42 ans…

Depuis l’école primaire, je réalise que ça n’a pas toujours été le fun. C’était le plus souvent chiant même. Mais les bouts le fun compensaient; comme les fins de semaine et les vacances. Le restant du temps, on nous baragouinait des leçons sérieuses et incompréhensibles, on nous les faisait répéter, on nous les faisait récrire, on nous en donnait en exercices à compléter… C’était chiant. En tout cas, ce n’était pas de la «pédagogie par projets», c’était de la leçon magistrale et autoritaire.

Si on m’avait demandé à quoi ça servait, à 6, à 10 ou à 15 ans, je n’aurais eu aucune idée. Ou alors seulement l’idée de protester contre l’autorité. Je n’aurais pas su à quoi ça servait à ces époques.

Mais je le sais aujourd’hui. Ce sont autant de phrases et de réflexes de pensée qu’ils m’ont imprimés dans le cerveau. C’est une éducation, une enculturation, une formation : c’est un formatage.

Mais c’en est un bon. Parce qu’il en faut un. C’est ça pour moi être Québécois.

Quand je lis le journal, dans mes relations à l’université, au travail, dans la rue, comme cycliste, partout… je m’appuie sur cette connaissance transmise depuis ma famille, puis par tous mes professeurs à l’intérieur comme à l’extérieur de l’école. Les petits réflexes de pensée, les façons de raisonner, les exemples de résolution de problèmes qu’ils m’ont forcés à mémoriser contre mon gré m’ont été plus qu’utiles : ils sont salutaires à chaque instant de ma vie.

C’est un héritage.

L’école ne peut pas faire de tous des diplômés. C’est triste, mais c’est une notion d’égalitarisme sans aucun fondement dans la praxis. Pourtant, au nom de la «lutte au décrochage», on a balancé cette éducation formelle dont j’ai pu bénéficier. Et on a balancé l’éducation spécialisée.
On se plie aujourd’hui tellement aux besoins des «consommateurs d’éducation» que sont devenus les parents, mais que sont aussi les enfants. Puis à la pression des médias, des rumeurs sur Internet, des compressions…

Pour les décrocheurs, il faut revaloriser les métiers. Nous avons d’excellents talents manuels au Québec. C’est visible partout, dans chaque région et jusque dans chaque réserve. Il faut mieux exploiter ce talent, cette ressource qui n’est pas qu’économique, mais une ressource humaine. Il faut l’allier à notre autre grand talent, le génie. Et enfin avec notre capacité manufacturière.

Les temps vont changer bientôt, l’économie deviendra des plus compétitives. Nous devons comme nation créer une marque de commerce. (Genre Ikea, mais en plus cher et en «plus authentique». 😉 )

C’est juste une idée comme ça…

Parce que ce n’est pas vrai qu’on va se laisser engloutir par un capitalisme anglo-saxon impitoyable qui ne cherche qu’à mcdonaliser et à walmartiser tout l’espace. Un capitalisme sauvage qui n’en a cure des langues, des cultures, ni des sociétés distinctes. Tant qu’il y a et un McDonald et un Wendy’s d’implantés côte à côte, c’est la «diversité» en marche.

Si on veut exister, il faut au moins qu’on affirme le faire. D’une manière ou d’une autre.

On doit rééduquer nos jeunes de manière plus stricte. Même si c’est plate pour eux. Il faut leur donner les meilleurs réflexes de pensée que nous ayons : la science, la raison, la pensée critique.
Il faut leur inculquer l’identité québécoise.  Celle qui est faite d’explorations et de métissages, mais avec une farouche volonté d’être républicaine et  française.
Même si c’est plate. Il faut que tous les élèves aient la possibilité d’acquérir cette éducation.

Au lieu, on tente aujourd’hui de faire en sorte que ceux qui n’acquièrent pas ces aptitudes se voient tous remis un diplôme à l’effort plutôt qu’aux résultats.

Enfin bref. Je favorise un retour à une éducation plus formelle. J’aimerais qu’on cesse de paniquer sur les taux de décrochage, puis qu’on trouve à quoi ces gens sont bons et qui serait utile. Qu’on fasse de notre monde une opportunité, un atout.  Qu’on fasse de notre monde une marque dans le monde.

[Fin des ruminations]




















J’ai d’abord rencontré le terrorisme islamique dans les années 1990, en Asie du Sud-Est.  Je l’ai vu se développer dans le sud de la Thaïlande et en Malaisie et en Indonésie.  Puis en Afghanistan avec les Talibans.  (La destruction des Bouddhas du Bamyan fut vécue comme une onde de choc dans tout le continent bouddhiste.)  On s’est tous collectivement demandé: «Mais qui sont ces fous?».

Puis je suis revenu au Québec.

Quand j’ai écrit ce qui suit, je venais tout juste de rencontrer le pendant québécois de ce que j’avais découvert en Asie, l’islamisme.
Patrick Lagacé avait publié un article à propos du forum du site mejliss.com.  Il était éberlué de ce qui s’y disait à propos des audiences de Bouchard-Taylor qui battaient leur plein, et de comment on n’y décrivait qu’un défoulement raciste.  Je ne le savais pas à l’époque, mais c’est une forum salafiste.  Un des forums musulmans francophones les plus fréquentés.
Je suis allé faire un tour sur le dit forum.  J’y ai découvert, discussion après discussion, des messages haineux envers les Québécois et les Québécoises.  Je ne suis pas sensible, mais là on parlait de porcs et de truies.  Allez visiter si vous doutez de ma parole.  Les messages sont plus circonspects aujourd’hui, depuis les mesures de sécurité accrues, mais l’allégeance salafiste y est encore explicite.

J’avais spontanément créé un compte sur le forum.  Puis j’y avais posté le message qui suit.
Le lendemain, j’ai été inondé de réponses haineuses.  La plupart concernant ma brève mention sur le mariage: «Beurk, jamais on ne deviendrait les concubines de kouffars!» donne le ton.  D’autres réponses allaient dans le sens de «l’islam est supérieur et vous ne nous convertirez jamais à votre religion de la laïcité!»


[Début de mon commentaire, circa 2007]

C’est ironique. Depuis quelques temps on entend plusieurs Musulmans critiquer les Québécois de souche et les traiter de racistes. Se plaindre aussi que les Québécois de souche sont intolérants envers les Musulmans, qu’ils sont islamophobes et exclusifs.

À lire ce forum, on voit que c’est plutôt vous qui pratiquez l’auto-exclusion et êtes racistes envers nous.  Vous accusez Lagacé des pires intentions et louangez les bons Musulmans pratiquants que vous êtes.  Mais en sous-texte vous parlez des Infidèles comme autant de fornicateurs et de putes sans morale.  Quel mépris vous affichez. Un mépris qui semble vous rendre paranoïaque de surcroît.

Franchement, j’espère qu’il y a plus d’Arabes, de Maghrébins et de Musulmans au Québec qui ressemblent à ceux interviewés par Lagacé qu’à ceux qui écrivent ici.
Sinon, je sens que c’est pour bientôt les appels au Califat québécois, à la Charia et au Jihad contre les mangeux de poutine.

Les Musulmans ne sont pas différents de tous les crinqués de la religion.  Drapés dans un voile de pureté, vous avez cessé de vous questionner pour plutôt vous consacrer à critiquer et à conspuer tous ceux qui ne se plient pas à votre folklore.

Mais bon. Je me suis obstiné assez de fois avec des fondamentalistes chrétiens, fondamentalistes juifs et fondamentalistes musulmans pour savoir que mes paroles n’auront aucun effet sur vous.  Vous ne connaissez pas l’autocritique.

Vous êtes tous, chacun de votre côté, si convaincus que votre livre à VOUS détient LA vérité divine. Alors pourquoi se poser des questions ?

C’est triste et épeurant.

Je crois malheureusement que nous connaîtrons encore quelques guerres religieuses avant que l’humanité comprenne, une fois pour toute, que les religions ne sont que des lubies porteuses de conflit.

Si vous cherchez vraiment à comprendre ce que beaucoup de «de souches» disent à la Commission Bouchard-Taylor, pensez à ceci: «auto-ségrégation».

Les Musulmans sont critiqués, d’une part parce que, partout sur la planète en ce moment, l’intégrisme militant est très actif dans cette religion. C’est assez indéniable.
Mais aussi et surtout parce que beaucoup de Musulmans militent assez fortement pour leur auto-ségrégation de la société laïque, au Québec comme partout en Occident. Peut-être ne le font-ils pas toujours verbalement: mais le voile, les prières à répétition, les menus halals, les discours sur les femmes et les demandes d’accommodements au travail, à l’école, à la piscine, etc., sont autant de formes de militantisme. Autant de façon de dire: «Voyez, je ne suis pas comme vous». «Voyez, nos enfants ne marieront pas les vôtres sous peine de châtiment.»  Quiconque ne comprend pas ce symbole sans équivoque dans le voile ne comprend rien à la sociologie.

Beaucoup de Québécois de souche voudraient vous considérer comme des collègues, amis, concitoyens, amants et amantes éventuels, mais ils se frappent à votre rejet. Et trop souvent, en grattant un peu, à votre mépris des «infidèles».

Mais ne soyez pas paranos: les Musulmans ne sont pas les seuls à être critiqués.
Tous ceux qui pratiquent l’auto-ségrégation le sont. Les capines, chapeaux de fourrure, kirpans, turbans et hijab disent tout haut ce que vous taisez: que vous ne voulez pas vous mêlez aux autres qui vivent de manière immorale et impure à vos yeux.
Que vous soyez musulmans, juifs, chrétiens ou témoins de Jéhovah, les préceptes, les locaux de prières, les menus séparés et les vêtements comme le hijab ne cessent de rappeler ce que vous pensez de tous ceux qui n’adoptent pas votre folklore religieux particulier. Même si ce n’est pas votre intention individuelle.

En ce qui a trait aux Musulmans en particulier, il y a toujours ce double discours. D’un côté on entend: «Ne me critiquez pas. C’est mon choix de porter le voile. Moi, je ne vous critique pas».  Mais de l’autre on entend: «Les femmes musulmanes sont vertueuses, modestes et morales». Ce qui veut dire, en toute logique, que les autres, les infidèles, ne le sont pas, quelles le sont moins…  on ne sait pas.

Et parfois, certains l’expriment un peu plus franchement que les autres :
(…) Mon voile n’est pas un mouchoir
C’est ma peau
Ma pudeur Ma dignité Mon respect
Et si toi immigrante de souche
Tu n’as ni foi ni loi
Et tu as passée ta jeunesse soule
D’un mâle à un autre
Ce n’est pas mon cas.

[Haydar Moussa]

Beaucoup à la Commission Bouchard-Taylor expriment une peur qui n’est pas sans fondement, même s’ils le font souvent maladroitement.
Cette peur c’est que bientôt il n’y aura plus au Québec qu’une poignée de gens s’appelant «Québécois». À la place, il n’y aura que des Juifs, des Chrétiens, des Musulmans et des Témoins de Jéhovah…, qui tous pratiquerons l’auto-ségrégation. Ils se tiendront entre eux, mangeront entre eux, prieront entre eux, iront à la piscine entre eux, se marieront entre eux, auront leurs propres écoles… Et tous regarderont les autres de haut en se drapant dans leur propre vertu, persuadés que LEUR livre saint à eux est LE bon. Et encore, que LEUR interprétation de leur livre est LA bonne.

N’avez-vous pas remarqué que, à côté de quelques cathos qui voudraient revenir 50 ans en arrière, le thème de la laïcité revient très souvent à la Commission ? Demandez-vous pourquoi.
Un consensus s’était établi, tranquillement et patiemment, depuis la révolution tranquille. Nous en étions venus à la réalisation qu’une société où les identités religieuses priment sur les autres et se manifestent fortement sur la place publique, eh bien ça mène tout droit au conflit: tout droit à Jérusalem et à Gaza, au Kosovo, au Pakistan ou au Soudan… Regardez ce qui se passe là-bas et autour: Juifs, Chrétiens et Musulmans s’y crachent tous au visage et se méprisent. Et ça c’est les modérés.

Or maintenant, on voit ici beaucoup de gens qui se disent musulman, juif ou chrétien avant d’être citoyen québécois, ou même avant d’être de simples individus.
C’est ça qui fait peur. Les religions donnent naissance à des identités fondamentalistes et exclusives, affectives et bien plus fortes que les nationalités, les langues ou les cultures. Elles parviennent à créer de la division entre voisins qui devraient se soutenir mutuellement.

Que vous soyez musulmans, juifs, chrétiens, uttérites ou raéliens…, ce n’est pas le problème.
Que vous le soyez «avant d’être citoyens», et que vous teniez à l’afficher tout haut, à le crier sans cesse sur la place publique, dans chacun de vos geste et chaque pièce de vêtement, ça l’est.

Je dis: laissons les identités religieuses qui divisent à la maison: sortons les solidarités humanistes sur la place publique. Que la foi informe la spiritualité, si vous y tenez: mais que la raison, la philosophie et la science informent nos modes de vie et nos relations sociales. Dans la rue, au travail et à l’école, soyons des citoyens et des individus avant d’être des «élus de dieu» et des «vertueux».


Pour terminer, je vous invite à considérer ceci. Les Musulmans se disent souvent victimes de discrimination et de persécution. Mais pensez aux «de souches» qui s’expriment en ce moment: ils sont traités de racistes, de xénophobes et d’islamophobes par les uns, et traités d’infidèles, de fornicateurs et de putes par certains autres (dont plusieurs sur ce site)…